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Témoignage de @peps_liberty

  • Photo du rédacteur: SAB 69
    SAB 69
  • 3 févr. 2022
  • 5 min de lecture

Dernière mise à jour : 5 août


J’étais en guerre avec moi-même. Ça résume bien mes 13 dernières années.  

Vers mon adolescence, j’ai connu une période assez difficile et j’en étais devenue impuissante. Aussi loin que je me souvienne, je me suis souvent effacée, ne trouvant pas ma place, me considérant comme un échec. Munie d’une faible estime de moi-même et d’un besoin accru d’amour et de reconnaissance, j’ai commencé à faire un régime anodin. Je me sentais tellement fière de réussir à contrôler mon alimentation & à perdre du poids, je ressentais ce sentiment de puissance et de considération. Le cercle vicieux s'est rapidement déclenché, ce n’était jamais assez et je devais perdre du poids encore et encore. C’était devenue une addiction aux kilos perdus, pour arriver à un poids osseux de 39 kg. Je m’autorisais un repas uniquement le soir et la journée je me nourrissais d’eau, de café et de sport. Je punissais mon corps par 3 à 4 heures de cardio par jour. Je pouvais me lever aux aurores pour commencer ma routine sportive. Je ne ressentais plus l’épuisement, j’étais juste euphorique. 



Avoir un contrôle sur la nourriture et mon corps a été un moyen d’adaptation pour faire face à ma tempête intérieure. L'anorexie a été un refuge pour faire face aux événements imprévisibles et difficiles de la vie. Elle a été une excuse pour rompre avec mes émotions, avec le monde extérieur et cacher un profond mal-être, une faible estime et confiance en moi. Elle a comblé ce vide en moi & m’a offert une considération pour moi-même, une identité par des habitudes sournoises. Je ne faisais qu’un avec elle, j’étais docile à ses ordres et elle effaçait mon côté vulnérable, mon vrai moi.  

J'ai perdu ma joie de vivre, ma spontanéité, mon humour, mon sourire, mes envies, mes passions pour laisser place au contrôle, à la perfection, l'apathie, l'hyperactivité, l'isolement, la souffrance, la haine. Je n’étais plus présente avec moi-même, avec les autres, j’étais coupée de toute rationalité. J'étais présente physiquement, fuyante émotionnellement. Le monde qui m'entourait n'avait que peu d'importance, je n'avais plus d'énergie à leur consacrer. Une simple parole me volait le peu d'énergie qu'il me restait. J’étais prise en otage dans ma cage dorée, où seuls le sport, la minceur, mes règles, mes rituels triomphaient.  



Je n’avais plus de limites & j’entrais dans le déni total face à l’inquiétude et l’impuissance de mon entourage. J'étais inconsciente du mal que je faisais autour de moi et à moi-même. Dans mon raisonnement, j’agissais de la bonne manière, j’avais le contrôle de la situation et j’avais besoin de l’anorexie pour exister et me protéger.   

En réalité, je n’étais pas la dominante, mais la dominée. Et cette domination commençait à me peser, mon corps me lâchait par des douleurs intenses, mon esprit se vidait. J’aspirais à ma liberté et à redevenir moi. Je sortais du déni et l’idée de la guérison commençait à s’ancrer en moi. Je n’ai pas choisi mon anorexie, mais j’ai compris que je pouvais décider la guérison. J’ai intégré que j’étais aux commandes de ma vie, que j’avais la puissante capacité à créer ma réalité, celle qui m’apporte le bien être, et devenir celle que je souhaitais. J’avais l’opportunité de reprendre le volant à l’anorexie. Je ne suis plus contrainte de la nourrir, croire ses pensées qui ont l’air vraies & convaincantes. J’ai admis qu’il y avait une issue.

 


J’ai donc commencé à me nourrir de lectures inspirantes, à lire des témoignages & des articles scientifiques pour comprendre ce qui arrivait à mon corps, mon cerveau en état de famine. La neuroscience et le développement personnel ont été une porte de sortie. J’avais soif d’apprendre et la connaissance a été comme un pouvoir sur ma guérison.   

J'ai progressivement lâché prise et traversé mes peurs que je croyais insurmontables. J’ai abandonné mon cardio pour laisser place au repos, j'ai recommencé à me nourrir plus, et à écouter ma faim inachevée. Mon corps reprenait ses droits. Difficile à digérer et d’accepter de voir son corps changer, mais je visualisais sans cesse mon après guérison et je me répétais dans les moments les plus durs que je devais passer par là pour retrouver ma liberté et que tout cela serait temporaire.  

Je me suis engagée à accepter l’inconfort sur le court terme pour une vie meilleure sur le long terme. Lâcher prise est éprouvant, mais à côté de ça, je commençais à revivre, à avoir de la gratitude pour les choses simples de la vie, comme sourire, rire, apprécier la sécurité d’un câlin, partager de merveilleux moments avec ses proches en étant pleinement présente. Et ça me donnait la motivation à continuer.  



En parallèle, j’ai entamé un cheminement sur moi-même, à déconstruire mes règles, mes croyances autour de la nourriture, du corps, mais également les pensées que j’ai sur moi-même. Comme un lavage de cerveau, j’ai mis de côté ce qui était une source de souffrance pour adopter des habitudes qui me faisait du bien. Si j’avais ancré des croyances malsaines pendant tant d’années alors j’étais capable d’en nourrir des saines, à me donner de l’amour et m’offrir une belle estime. Plus j’avance sur ce chemin, plus j’ai l’impression de perdre une partie de moi-même et pourtant je redécouvre un nouveau moi. Je m'étais tellement identifiée à la maladie ! En réalité, un TCA ne nous définit pas, bien au contraire, il fait apparition dans notre vie comme une façade à notre douleur et enfouir notre véritable nous. Il se présente comme un « sauveur ». Et le chemin de la guérison, c’est de décortiquer les croyances incompatibles à notre bien-être, se dissocier de la maladie, expérimenter et partir à la connaissance de soi. En apprenant à me reconnecter à moi-même, et en adoptant de nouvelles stratégies bienveillantes, je me libère de mon anorexie. 



Pendant ces 13 ans, j’ai la chance d’avoir eu beaucoup d’amour et un soutien exceptionnel de mes proches, mais avec le recul je ne me considérais pas comme assez malade pour mériter un soutien, je refusais l’aide extérieure car je pensais que de toute manière on ne me comprendrait et je m’obstinais à vouloir m’en sortir toute seule, j’étais encore une fois dans le déni et sous le contrôle de mes pensées troublées. L'anorexie est fourbe et vous fera croire que vous n’avez besoin d’aucune aide. Avec le recul que j’ai aujourd’hui, j’aurais accepté de me faire aider, d’avoir une écoute sans jugement, et d'acquérir les outils pour me libérer. Je ne regrette pas mon parcours, j’ai établi beaucoup de recherches pour m’en sortir, mais qui prenait beaucoup de temps aussi. Alors ne refusez pas une main tendue, une assistance, vous le méritez. Vous n’avez pas à traverser ça seul(e). 

 


Gardez à l’esprit que la guérison demande du temps, qu’elle est périlleuse et ne sera pas linéaire. Vous aurez des jours où vous serez plein d’espoir et d’autres remplis de doutes où vous vous sentirez bloqué. J’ai eu des rechutes, beaucoup même, mais grâce à elles, j'ai acquis de l’expérience et elles m’ont propulsé plus loin dans mon voyage. Ça fait partie du processus et elles ne déterminent pas l’espoir de guérison. Étonnement, mon TCA m'aura poussé à faire un travail sur moi, à comprendre une partie de mes blessures et à les accepter, à réfléchir à la personne que je souhaite devenir, à faire face à mes peurs les plus profondes & à dévoiler la force en moi. L'anorexie fait de moi qui je suis aujourd'hui et j'avance encore pour le meilleur. Je continue chaque jour mon cheminement pour être heureuse avec moi-même, de profiter de chaque instant qui passe et de construire un bel avenir, qui auparavant était inexistant.  

Chaque petit pas compte pour se détacher de l’emprise de l’anorexie, alors équipez-vous de patience, de bienveillance et de compassion envers vous-même.  

Il y a une lumière au bout du tunnel et vous avez cette force en vous pour traverser ça, n’en doutez jamais. 


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